Hôpital psychiatrique ou Centre Pénitentiaire dans le Gers

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Le Centre Hospitalier du Gers, hôpital psychiatrique situé au centre de la ville d’Auch, au cadre jusque-là accueillant, si apaisant pour les malades, est en train de connaître des heures sombres, les plus sombres peut-être de son histoire.

En dépit de l’opposition de nombreux membres du corps médical, ainsi que du CHSCT réuni en septembre, la direction du C.H.G. a décidé d’accepter une enveloppe budgétaire attribuée par une circulaire gouvernementale en début d’année, enveloppe destinée à « améliorer la sécurité » des établissements psychiatriques.

Ce « budget sécurité », d’un montant de 300 000 €, a été affecté comme suit : 100 000 € pour renforcer les chambres d’isolement prévues dans l’aile actuellement en construction, et 200 000 € pour installer des caméras de vidéo-surveillance et « améliorer la sécurité des enceintes » de l’établissement.

Ainsi l’entrée du C.H.G. est-elle maintenant une véritable porte blindée, digne d’une forteresse ou d’un pénitencier, entourée d’un grillage infranchissable de 3 m 50. Ainsi la vaste cour arborée d’une unité fermée, qui constituait un espace de promenade irremplaçable pour des patients ne pouvant sortir librement, est-elle maintenant défigurée par une double rangée de semblables grillages – hideux et oppressant  barrage qui rappelle immanquablement les murs de Berlin ou de Jérusalem.

En l’absence de personnel suffisamment nombreux et formé, ces murs, ces caméras de la honte ne sont pas seulement inefficaces : il est si facile de s’évader par ailleurs, une porte mal fermée, une permission de sortie… Ils ne sont pas seulement dangereux : en aggravant la promiscuité, le sentiment de persécution de certains patients, ils vont favoriser les passages à l’acte violents. Ils traduisent surtout une mutation mortifère du soin vers le gardiennage, un « grand renfermement » après 50 ans d’ouverture de la psychiatrie vers la cité, une « nuit sécuritaire » qui tombe sur notre humanité, prétendant sanctionner, refouler la folie qui est en nous.

« Une société se juge à la façon dont elle traite ses fous », disait un psychiatre humaniste célèbre. N’ayons pas peur de rappeler que toute cette affaire de « sécurité » des hôpitaux psychiatriques est née il y a un an, par l’exploitation populiste d’un fait divers (un meurtre exceptionnel commis par un schizophrène) par le chef de l’Etat lui-même… En voulant renfermer davantage les malades mentaux, désignés faussement comme dangereux, à l’intérieur des murs de l’asile, c’est la vieille stratégie du bouc-émissaire, l’exclusion de la déviance et de la différence qui a été utilisée : il s’agit avant tout, par une opération de propagande, de rassurer les foules et de les rassembler derrière un chef, un ordre socio-politique omnipotents. Ce faisant, c’est tout un système de domination économique qui cherche à se perpétuer, alors même qu’il traverse une crise gravissime, et c’est finalement notre société tout entière qui glisse sournoisement vers l’abîme…

Ne soyons pas dupes de la multiplication de ces cloisonnements sociaux qui cherchent à protéger les intérêts d’une caste de nantis : abattons ces nouveaux murs qui enferment notre conscience et font honte à notre humanité !

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